Dans un contexte de tension sur les recrutements, les ETI du secteur agroalimentaire en France doivent relever un double défi : attirer des profils qualifiés et, surtout, les fidéliser durablement. En dehors des grandes métropoles, sur des bassins d’emplois parfois peu visibles, ces entreprises structurantes cherchent à créer des environnements de travail où l’engagement ne soit pas une injonction, mais une réalité vécue.
Avec près de 19 000 entreprises et plus de 460 000 salariés, l’agroalimentaire est le premier secteur industriel en France.
Si les grands groupes disposent d’outils et de moyens pour séduire les talents, les ETI, qui représentent l’essentiel du tissu industriel en région, doivent rivaliser d’ingéniosité pour retenir leurs collaborateurs.
« Désormais, fidéliser les talents relève autant de la performance RH que de la compétitivité industrielle », souligne Olivier Barachet, Practice Director chez NAOS International. Pour ces structures, la fidélisation n’est pas un luxe, mais une nécessité stratégique.
Un enjeu d’attractivité pour des territoires parfois oubliés
Une grande partie des ETI agroalimentaires sont implantées loin des grandes agglomérations. Cette implantation territoriale est à la fois une force – proximité avec les matières premières, ancrage local – et un frein potentiel à l’attractivité.
Loin des grandes villes, il ne suffit plus de proposer un emploi. Il faut offrir une qualité de vie, des perspectives de formation, un projet d’entreprise lisible. Certaines ETI ont compris cela et investissent dans l’accompagnement à l’installation, la formation continue, ou encore la relation avec les écoles locales. Ces dispositifs permettent non seulement d’attirer, mais surtout de faire rester.
L’engagement : entre culture d’entreprise et gestion du quotidien
L’engagement des collaborateurs ne se décrète pas. Il se cultive. Dans l’agroalimentaire, où les contraintes de qualité, de sécurité et de production sont fortes, le sentiment d’utilité, la reconnaissance et l’écoute prennent une importance particulière.
Les entreprises les plus avancées structurent des parcours de reconnaissance, organisent des feedbacks réguliers, intègrent les opérateurs dans les démarches de qualité ou d’amélioration continue. L’intelligence collective devient un levier de motivation autant qu’un facteur de performance.
Un rapport Gallup publié en 2024 indiquait que les entreprises affichant un haut niveau d’engagement de leurs salariés étaient 23 % plus rentables et réduisaient leur turnover de moitié. Ce constat se vérifie aussi dans les ETI agroalimentaires, à condition de mettre en place des pratiques RH robustes.
« L’engagement se construit au quotidien, dans les gestes de reconnaissance, le développement des compétences et le sentiment de contribuer à une mission collective », rappelle Olivier Barachet.
La formation, levier décisif de fidélisation
La pénurie de main-d’œuvre qualifiée est un fait établi dans le secteur. Mais plus qu’un manque de candidats, c’est souvent un manque de projets professionnels clairs qui nuit à la fidélisation. Les jeunes générations, notamment la génération Z, attendent de leur employeur plus qu’un emploi : elles veulent du sens, des évolutions, des compétences.
C’est ici que la formation continue devient un outil puissant. Les ETI qui proposent des programmes de montée en compétences sur plusieurs années, qui permettent aux opérateurs de devenir managers ou aux techniciens de piloter des projets transverses, renforcent l’attachement de leurs salariés.
Certaines entreprises vont plus loin en créant des académies internes ou en intégrant des modules de formation sensorielle et expérientielle, notamment autour des produits. Cela alimente non seulement la technicité, mais aussi la fierté d’appartenance.
Quand la culture d’innovation devient un facteur d’engagement
L’agroalimentaire est souvent perçu comme un secteur traditionnel. Pourtant, les innovations y sont nombreuses : traçabilité blockchain, automatisation, circuits courts, réduction de l’empreinte carbone, nouveaux emballages durables… Et ces projets sont autant d’opportunités de fédérer les équipes.
Impliquer les collaborateurs dans ces chantiers stratégiques permet de renforcer leur sentiment d’utilité et de leur donner une place active dans la transformation de leur entreprise. Dans certaines ETI, les salariés participent à des ateliers de co-développement, à des démarches d’innovation participative, ou à des groupes de réflexion sur l’empreinte environnementale.
Ces initiatives contribuent à développer une culture d’entreprise agile et ouverte, où chacun peut se projeter à moyen terme.
Vers une marque employeur agroalimentaire forte
Trop souvent, les ETI agroalimentaires sont peu connues du grand public. Pourtant, elles sont les garantes de la souveraineté alimentaire française, de la qualité des produits, de l’innovation locale. Pour fidéliser les talents, elles doivent mieux communiquer sur leur mission, leurs valeurs et leurs réussites.
Certaines le font en valorisant leurs collaborateurs via des portraits internes, des vidéos de métier, des témoignages sur les réseaux sociaux professionnels ou en participant à des salons de l’emploi spécialisés.
D’autres misent sur leur impact sociétal et environnemental pour séduire des profils en quête de sens. Produire local, réduire les déchets, s’impliquer dans la vie de la commune sont autant d’actions qui, bien racontées, renforcent l’engagement.
La fidélisation et l’engagement dans les ETI agroalimentaires ne sont pas qu’une affaire de RH
Ce sont des piliers de performance, de stabilité industrielle et de différenciation. En misant sur la formation, la reconnaissance, la transparence et l’innovation, ces entreprises peuvent construire des relations durables avec leurs collaborateurs.
Et surtout, elles peuvent assumer pleinement leur rôle : être des acteurs de lien, de qualité et de transformation dans une industrie en pleine mutation.