En 2021, l’INSEE recensait 6 600 entreprises de taille intermédiaire (ETI) en France représentant 29 % du chiffre d’affaires et générant 31,8 milliards d’euros de chiffre d’affaires à l’export, contribuant ainsi à près d’un tiers de l’ensemble des exportations du système productif. Les petites et moyennes entreprises (PME) sont au nombre de 158 600 en 2021. Elles emploient 29% des salariés en France, représentent 23% de la valeur ajoutée et génèrent 11,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires à l’export. La somme des exportations de ces deux catégories d’entreprises est presque équivalente à celle des grandes entreprises françaises (54,4 milliards d’euros).
L’expansion à l’international représente donc aujourd’hui un enjeu stratégique majeur pour les ETI et PME dont un grand nombre est implanté en région. Alors que Paris bénéficie d’une densité historique de talents et d’investissements, les territoires régionaux montrent une dynamique croissante dans leur conquête de nouveaux marchés, notamment à l’international. Dans un contexte national politique et économique instable, l’internationalisation constitue plus que jamais un levier de croissance durable et une réponse aux défis de la compétitivité mondiale.
Les enjeux de l’internationalisation pour les ETI et PME régionales
Une compétitivité mondiale
Face à la mondialisation accélérée et à la digitalisation des échanges, les ETI et PME régionales qui souhaitent développer et pérenniser leur business doivent se projeter au-delà des frontières. Selon une étude de BPI France (2024), près de 65 % des entreprises régionales considèrent l’expansion internationale comme un vecteur de croissance essentiel pour se démarquer de la concurrence.
Une exigence d’innovation et de compétitivité
L’internationalisation oblige les entreprises à innover pour s’adapter aux exigences de marchés variés. La confrontation à des cultures d’entreprises différentes et à des réglementations hétérogènes incite à la mise en place de stratégies agiles et à l’intégration de nouvelles technologies. L’adoption d’outils digitaux pour le suivi des performances à l’international et la gestion des ressources humaines en font partie intégrante. Notons d’ailleurs l’importance des Country Managers dans le processus d’expansion (une bonne occasion de se replonger dans notre article dédié sur le sujet). Cette dynamique d’innovation se traduit par une amélioration continue des process internes et une montée en gamme de l’offre produit ou service, renforçant ainsi la compétitivité globale.
« L’internationalisation est une opportunité majeure pour les ETI et PME régionales. Par nature, comme dans les secteurs de l’agroalimentaire, du luxe ou de la cosmétique, de belles PME-ETI n’ont pas d’autres choix que de se structurer hors de nos frontières.
La diversification des marchés et l’innovation constante permettent de répondre aux défis d’une économie mondialisée tout en créant de la valeur sur le long terme pour ces organisations, » déclare Philippe Fresse, Directeur Sud Est chez NAOS International.
Les leviers et stratégies pour réussir l’expansion internationale
L’importance d’une stratégie sur-mesure
La réussite d’un projet d’internationalisation repose sur une stratégie adaptée aux spécificités de chaque entreprise. Les PME et ETI doivent établir un diagnostic précis de leurs forces, de leurs faiblesses et des opportunités offertes par les marchés étrangers. L’analyse de l’environnement concurrentiel, la segmentation des marchés cibles et l’identification des partenaires locaux sont des étapes déterminantes. Il convient également de bien prioriser ses actions et de ne pas se disperser dans son expansion. Les études menées par la Chambre du Commerce et de l’Industrie de Marseille (2024) mettent en avant que la personnalisation de l’approche commerciale et marketing est essentielle pour convaincre des clients aux attentes variées. L’élaboration de plans d’actions culturels, linguistiques et réglementaires couplés au recrutement d’un country manager disposant d’une expérience et d’une connaissance significative du marché adressé constituera la base indispensable d’une bonne expansion.
La capitalisation sur l’identité locale et le savoir-faire régional
Le succès des entreprises de la région Sud repose en grande partie sur leurs capacités à valoriser leur identité locale. Les traditions, l’art de vivre et le savoir faire régional constituent des atouts majeurs qui, lorsqu’ils sont bien exploités, créent une véritable différenciation sur les marchés internationaux. L’élaboration d’un storytelling authentique couplé à la valorisation de références permettent de renforcer l’attractivité des entreprises et de susciter l’intérêt des consommateurs étrangers. En combinant tradition et innovation, ces entreprises parviennent à créer des synergies entre leur héritage culturel et les demandes croissantes d’un marché global.
« En mariant tradition et modernité, elles créent une synergie où le savoir-faire local se mue en avantage stratégique sur la scène internationale, comme le démontrent les fleurons de la région PACA » rappelle Philippe Fresse.
L’internationalisation des entreprises régionales, loin d’être une démarche de simple expansion géographique, s’inscrit dans une stratégie globale de valorisation des talents et des savoir-faire locaux.
En se détachant de l’influence parisienne, ces entreprises affirment leur singularité et leur capacité à s’adapter à un marché mondialisé, tout en cultivant les richesses et les atouts propres à leur territoire.
Cette diversification territoriale permet ainsi de repenser les modes de gouvernance économique et de favoriser un développement durable.
De surcroît, l’expérience des entreprises de la région Sud, qui ont su tirer parti de leur ancrage territorial, montre que la réussite de l’internationalisation repose également sur une exploitation intelligente des atouts locaux.
Qu’il s’agisse de valoriser un patrimoine culturel riche ou de mettre en avant des méthodes de production uniques, chaque territoire possède des ressources qui, une fois intégrées à une stratégie globale, peuvent transformer les défis en opportunités.
Le sud de la France est le berceau de nombreuses entreprises qui ont su conquérir des secteurs et marchés internationaux grâce à des stratégies innovantes et une expertise établie. Le Groupe NGE pour Nouvelles génération d’entrepreneurs est créé en 2001 à Saint Etienne du Grès dans les Bouches-du-Rhône de la réunion de deux entreprises : Guintoli un des premiers terrassiers de France et EHTP, groupe hydraulique. Le groupe s’est rapidement étoffé par croissance organique et croissance externe et diversifiée pour devenir un acteur multi-métiers du BTP. Aujourd’hui NGE compte plus de 10 000 collaborateurs pour un chiffre d’affaire qui a dépassé 3 millards ainsi qu’une présence dans plus de 20 pays tout en défendant un modèle de management atypique, le groupe appartenant à 72% à ses fondateurs, dirigeants et collaborateurs.
Le Groupe ADF (anciennement Ateliers de Fos) est une société d’ingénierie axée sur la production et la maintenance fondée en 1962 à Fos-sur-Mer. Depuis 2005 le groupe a su diversifier et internationaliser ses activités, notamment par croissance externe. Il est aujourd’hui présent dans une dizaine de pays, dans les secteurs de la mobilité, l’énergie, les matériaux, la technologie et la santé & bien-être. Le groupe défend, entre autres, l’engagement d’équipes et la proximité avec ses collaborateurs notamment à travers un modèle de gouvernance managériale. En 2023 le groupe ADF a réalisé un chiffre d’affaires de 540M€ en 2023 et vise le milliard en 2030 ; il compte 4000 collaborateurs.
Dans un autre registre, la société Fogale Sensors, créée à Nîmes en 1983 par des chercheurs se spécialise dans la conception et la commercialisation de capteurs de haute technologie et de haute précision permettant de mesurer des distances, positions, déplacements et vibrations sans contact dans des environnements contraints. Dans un premier temps adressé au marché de la mesure dimensionnelle, la société a étendu son champ d’activité au spatial, au médical, à la turbomachinerie, à la robotique ou encore à l’automobile. Elle réalise aujourd’hui 70 % de son chiffre d’affaires à l’international.
« Les entreprises qui se démarquent à l’international adoptent une stratégie sur-mesure qui intègre une compréhension fine des marchés locaux et un recrutement ciblé pour renforcer leur compétitivité » observe d’ailleurs Philippe Fresse.
La rupture avec le modèle traditionnel centré sur Paris ouvre la voie à une redéfinition profonde des réseaux économiques, favorisant une approche plus équilibrée et décentralisée du développement territorial. En effet, la montée en puissance des pôles régionaux, impulsée par des initiatives combinées des acteurs publics et privés, permet l’émergence de véritables hubs économiques locaux, capables de rivaliser en attractivité avec la capitale. Ces pôles régionaux misent sur des avantages concurrentiels tels que la proximité géographique, la spécialisation sectorielle, et surtout une compréhension fine des réalités locales.
Cette évolution offre ainsi aux entreprises une opportunité unique de tirer parti d’un tissu économique plus proche de leurs besoins opérationnels et stratégiques. Par ailleurs, elle favorise l’innovation et la coopération inter-entreprises grâce à des réseaux de partenaires locaux solidement ancrés dans leur territoire. En somme, cette dynamique régionale contribue à façonner un écosystème économique agile, innovant et résilient, dans lequel les acteurs économiques bénéficient directement d’une meilleure connaissance du terrain et d’une réactivité accrue face aux évolutions du marché.